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mercredi 19 mai 2010

Euro: crise d'adolescence ou profonde déprime ?

19.05.10 - 08:48
 
L'euro traverse une zone de forte turbulence. "La plus grave crise depuis 1918", clamait le gouverneur de la BCE, Jean-Claude Trichet il y a quelques jours. Alors, crise d'adolescence ou profonde déprime? Bertrand Henne pose la question à deux spécialistes.
Le feu couvait depuis plusieurs semaines dans la maison euro. Il s'est déclaré au lendemain de l'adoption par les 27 d'un plan d'action destiné à venir en aide aux pays de la zone euro en grande détresse budgétaire. Est-il encore temps d'éteindre l'incendie ou bien celui-ci va-t-il se propager jusqu'à détruire l'édifice de la monnaie commune ?  Pierre Defraigne, du Collège d'Europe de Bruges et Geert Noels, l'auteur de "Econochoc",  tentent d'éclaircir les choses.
Pour certains économistes, les éléments déclencheurs de l'incendie avaient été placés dès l'origine sous le berceau de l'euro. Faute d'une véritable gouvernance économique de la zone euro et faute de mesures de contrainte pour faire respecter les conditions fixées dans le "pacte de stabilité", une monnaie commune reposant sur des économies par trop divergentes ne pouvait que connaître la crise que nous connaissons, disent-ils.

L'enfantement dans la douleur de l'union monétaire

Aujourd'hui, l'Allemagne -parfois pointée du doigt pour avoir longtemps freiné une initiative européenne commune de soutien à l'euro- a décidé unilatéralement d'interdire les "ventes à découvert", afin d'enrayer la spéculation sur l'euro. Une mesure "justifiée", selon Geert Noels, qui ne pense pas, toutefois, que cela va résoudre les problèmes fondamentaux. "Mais des mesures comme la suppression des CDS, ces fameuses assurances contre le risque de faillite d'autres pays, sont justifiées car il y avait beaucoup de spéculation". Un phénomène, souligne-t-il, qui n'existe pas par génération spontanée mais qui intervient lorsqu'il y a des problèmes sous-jacents fondamentaux. C'est donc à ceux-là qu'il faut s'attaquer.
"Nous assistons à la véritable naissance de l'Union économique et monétaire", affirme de son côté Pierre Defraigne, qui ne nie pas pour autant qu'il s'agisse d'une crise profonde. Jusqu'ici, "on a travaillé dans une 'zone monétaire', sans la politique qui doit accompagner une monnaie commune". Aujourd'hui, "on est en train de mettre en place, dans la douleur, une politique dont les premiers éléments arrivent en ordre dispersé et par une méthode très inconfortable. Et on le fait sous la pression des marchés", explique-t-il. "En ce sens, les marchés financiers jouent un rôle objectivement utile, parce qu'ils forcent des politiques qui n'ont pas le choix de prendre des mesures très difficiles de transfert de souveraineté". Car ces transferts de souveraineté, pour lui, c'est "le nœud du problème". Il voit trois domaines dans lesquels ces transferts doivent s'opérer : économique, financier et fiscal.

L'indispensable harmonisation fiscale

"Les marchés voient bien que sur le long terme l'Europe ne sera pas une zone porteuse de croissance ; et que les Etats Unis et la Chine sont infiniment plus performants". Il y a donc là "une inquiétude de fond", à laquelle s'ajoutent "les malheurs de certains pays". C'est ce qui explique la dégradation de l'euro. Mais, dit-il, le rôle des marchés s'avère en définitive utile. "Qui aurait imaginé que l'Allemagne malgré toutes ses réticences, aurait été partie à un accord visant à fournir 750 milliards d'euros pour consolider (...) l'Europe face à la spéculation?" , demande-t-il. "Et on voit bien qu'il y a d'autres choses dans le pipe-line : au niveau de la régulation financière on met en place un dispositif", dit-il, tout en pointant qu'il faudra aller plus loin sur le plan fiscal : "On va devoir poser, comme l'a fait le commissaire Mario Monti dans son rapport sur le marché intérieur, la question de l'harmonisation de la fiscalité dans la zone euro. C'est indispensable !"
Avec l'alignement de plusieurs plans visant à rassembler de l'argent pour aider les pays en difficulté, Geert Noels ne pense pas que, pour autant, on soit sorti de la crise. "Ce qu'on a fait, c'est qu'on  a ramassé beaucoup d'argent pour apporter  une nouvelle couche de dette à la Grèce afin de lui permettre de financer ses charges d'intérêt. Je ne crois pas que cela apporte une solution au problème grec", lâche-t-il. Pour casser l'effet boule de neige sur les intérêts de la dette, il faut d'abord, dit-il, restructurer la dette, avant de faire jouer des plans de sauvetage.

Le pessimisme comme seul recours...

Restructurer la dette, ce serait par exemple "instaurer un moratoire sur les charges d'emprunt pendant 4 ou 5 ans, ce qui soulagerait immédiatement le déficit grec, et en même temps mettre en application les mesures du FMI. La combinaison des deux pourrait faire en sorte que la Grèce repasse dans une situation de surplus budgétaire en quelques années". Il ne cache pas que cela coûterait, mais surtout "aux investisseurs qui ont pris le risque direct : ça leur enlèverait leur revenu sans faire baisser la valeur de leur investissement. Pour le secteur bancaire, cela pourrait donc être absorbé".
Pour Geerts Noels, le plan de 750 milliards d'euros ne va pas donc pas changer grand-chose. Il regrette que les principes d'orthodoxie qui étaient à la base de l'euro et qui lui valaient une certaine confiance dans les banques centrales du reste du monde, aient été balayés en quelques semaines.
Finalement, les économistes sont-ils optimistes ou pessimistes quant à l'avenir de l'euro ? "Le pessimisme est l'ingrédient majeur du succès", répond Pierre Defraigne. "Il pousse les gens à oser des décisions courageuses et difficiles", conclut-il.
Thomas Nagant

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