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mardi 5 janvier 2010

Un arrière-goût de 1937.







Voici ce qui nous (les États-Unis, ndt) attend au niveau des actualités économiques : le prochain rapport sur l'emploi pourrait indiquer que l'économie gagne des emplois pour la première fois depuis deux ans.
Le prochain rapport sur le PIB pourrait indiquer une forte croissance à la fin de l'année 2009. Il y aura beaucoup de commentaires revanchards - et les éternels appels à la fin de la relance, à la machine arrière du gouvernement et de la Réserve fédérale en matière de consolidation de l'économie, risquent de se faire plus pressants.
Mais si ces appels sont entendus, nous reproduirons la grande erreur de 1937, quand la Fed et le gouvernement Roosevelt décidèrent que la Grande Dépression était passée, qu'il était temps pour l'économie de jeter ses béquilles. On réduisit les dépenses, on durcit la politique monétaire - et l'économie replongea illico dans les abysses.
Cela ne devrait pas se passer ainsi. Ben Bernanke, le président de la Fed, ainsi que Christina Romer, présidente des conseillers économiques de Barack Obama, sont des spécialistes de la Grande Dépression. Romer a émis une mise en garde explicite contre la réédition des événements de 1937. Mais il arrive à ceux qui se souviennent du passé de le réitérer quand même.
Quand vous lirez les actualités économiques, il faudra vous souvenir, tout d'abord, que les petits pics - de bons chiffres occasionnels, qui ne veulent rien dire - sont courants même quand l'économie est, en fait, embourbée dans une crise prolongée. Au début de l'année 2002, par exemple, les premiers rapports indiquaient que l'économie croissait à un rythme annuel de 5,8 %. Mais le taux de chômage continua de grimper pendant encore un an.
Et au début de l'année 1996, les rapports préliminaires indiquaient que l'économie japonaise croissait à un rythme annuel de plus de 12 %, drainant des proclamations triomphantes que "l'économie est enfin entrée dans une phase de reprise autopropulsée". En fait, le Japon n'en était qu'à mi-chemin de sa décennie perdue.
De tels pics sont souvent, en partie, des illusions statistiques. Mais plus important encore, ils sont souvent causés par un "rebond de stocks". Quand l'économie s'effondre, les entreprises se retrouvent typiquement avec des stocks d'invendus importants. Pour les écouler, ils réduisent la production ; une fois débarrassés de leurs excès, ils augmentent de nouveau la production, ce qui se traduit par une soudaine croissance du PIB. Malheureusement, la croissance due à un rebond de stocks n'est qu'éphémère, sauf si elle est relayée par une demande sous-jacente, comme la consommation des ménages ou un investissement à long terme.
Ce qui nous amène aux bases toujours sombres de la situation économique.
Pendant les bonnes années de la dernière décennie, telles qu'elles étaient, la croissance était soutenue par un boom immobilier et une hausse de la consommation des ménages. Aucune des deux n'est près de revenir. Il ne peut y avoir de nouveau boom immobilier alors que le pays est toujours envahi de maisons et d'appartement laissés vacants par le boom précédent, et que les consommateurs - qui sont plus pauvres de 11 000 milliards qu'avant le boom immobilier - ne sont pas près de revenir aux anciennes habitudes de l' "achetez maintenant n'épargnez jamais".
Que reste-t-il ? Un boom d'investissements d'entreprises serait vraiment utile en ce moment. Mais difficile de voir d'où viendrait un tel boom : l'industrie souffre de surcapacité, et les loyers commerciaux s'effondrent face à l'excédent d'espaces de bureaux.
Les exportations peuvent-elles venir à la rescousse ? Pendant un temps, un déficit commercial américain en chute a permis d'amortir la crise économique. Mais ce déficit s'agrandit encore, en partie à cause de la Chine et d'autres pays excédentaires qui refusent d'ajuster leurs monnaies.
Alors il y a de grandes chances pour que les nouvelles économiques que vous allez entendre dans un futur proche soient un pic, et non une indication que nous sommes en route vers une reprise durable. Mais les politiques interpréteront-ils ces nouvelles de travers, et répèteront-ils les erreurs de 1937 ? En fait, c'est déjà le cas.
L'effet de la relance fiscale d'Obama devrait atteindre son pic en matière de PIB et d'emploi vers le milieu de cette année, puis commencer à s'évanouir. C'est bien trop tôt : pourquoi cesser le soutien devant un chômage de masse persistant ? Le Congrès aurait du adopter un second tour de relance il y a des mois, quand il devint évident que la crise allait être plus profonde et plus longue que prévu. Mais rien ne fut fait - et les bons chiffres illusoires que nous allons voir vont sans doute éloigner encore toute autre possibilité d'action.
Dans le même temps, à la Fed on ne parle que de la nécessité d'une « stratégie de sortie" de ses efforts pour soutenir l'économie. Un de ces efforts, le rachat de la dette à long terme du gouvernement américain, est déjà arrivé à son terme. Beaucoup s'accordent à dire qu'un autre effort, le rachat de sécurités garanties par les hypothèques, devrait cesser dans quelques mois. Cela revient à une rigueur budgétaire, même si la Fed n'augmente pas les taux d'intérêt - et Bernanke subit une pression importante pour faire cela également.
La Fed réalisera-t-elle, avant qu'il ne soit trop tard, que la lutte contre la crise n'est pas finie ? Le Congrès en fera-t-il autant ? Si ce n'est pas le cas, 2010 sera une année commençant par un faux espoir économique et finissant en deuil.

Paul Krugman
© 2009 The New York Times News Service

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