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vendredi 1 janvier 2010

Le testament de la décennie - 1. Le chaos des années Bush



Le testament de la décennie - 1. Le chaos des années Bush

Un des premiers discours du nouveau président américain, le 13 décembre 2000
Photo : Agence France-Presse


Un des premiers discours du nouveau président américain, le 13 décembre 2000
Qu'y a-t-il de plus marquant dans la dernière décennie que les attentats du 11 septembre 2001? À question audacieuse, réponse audacieuse: l'homme qui a réagi à cet événement... et à ceux qui ont parsemé les 10 dernières années.

La décennie qui prend fin aura été celle de George W. Bush. Et les gestes de l'occupant de la Maison-Blanche entre 2000 et 2008 ont eu des conséquences plus vastes pour le monde que les attentats commis à New York et à Washington.

Guerre en Afghanistan, guerre en Irak, refus de s'attaquer aux changements climatiques, mépris des instances multilatérales, mensonges planétaires, obsession de la sécurité... L'empreinte de Bush est partout. Son règne controversé a même contribué à l'arrivée au pouvoir du premier Noir à la Maison-Blanche (voir la 11e position: «4 novembre 2008, élection de Barack Obama»).

Au Canada aussi, l'ombre de «W» plane, puisque les conservateurs de Stephen Harper ont inclus certaines de ses méthodes dans leur attirail politique: contrôle de l'information, accent sur l'image, polarisation des débats, populisme judiciaire, vision en noir et blanc de la politique — «Vous êtes avec nous ou contre nous».

Les années Bush ont d'ailleurs été largement décodées. Posons donc une autre question: à quoi ressemblerait le monde aujourd'hui si les neuf juges de la Cour suprême des États-Unis n'avaient pas décidé de plonger dans le débat politique pour couronner Bush le 12 décembre 2000? Et si Al Gore avait été élu...

«Cette date est sans aucun doute un moment important de l'Histoire», estime Bill Turque, journaliste politique au Washington Post et auteur du livre intitulé Inventing Al Gore, une biographie de l'ancien vice-président publiée en 2000. «Il y a un cliché à Washington qui dit que chaque élection présidentielle est la plus importante de notre vie. Mais je crois que celle-là, c'était vrai. Beaucoup de choses auraient été différentes avec Al Gore comme président», a-t-il raconté au Devoir lorsque joint dans la capitale américaine.

Retour en 2000

Léger retour en arrière, au moment où tout a basculé. Le soir du 7 novembre 2000, les Américains vont au lit sans savoir qui sera leur président. Et le monde entier retient son souffle. Dans les jours qui suivent, la planète a les yeux rivés sur une poignée de districts de la Floride, où règne une confusion dans les bureaux de vote.

Près de 45 000 bulletins ont été mal poinçonnés, ce qui a révélé l'archaïsme du système de votation dans certains quartiers pauvres de la Floride... et à quel point le sort de la grande puissance mondiale dépend d'un système politique bancal.

La Cour suprême de la Floride, dont les neuf juges ont été nommés par des démocrates, ordonne le recomptage des bulletins, même si l'État de la Floride, dominé par le gouverneur républicain Jeb Bush (le frère de l'autre), s'y oppose.

À la demande de George W. Bush, la Cour suprême des États-Unis — où 7 des 9 juges ont été nommés par des républicains — entre dans la bagarre le samedi 9 décembre 2000. Elle ordonne la fin du recomptage, affirmant qu'il est inconstitutionnel de revoir les bulletins de vote si aucune norme unique ne s'applique d'un district à l'autre.

Mais, le 12 décembre, coup de tonnerre. Après avoir entendu les arguments des deux clans, la Cour suprême choisit de ne pas renvoyer la cause à la Cour suprême de la Floride ou encore d'imposer une norme unique de révision des bulletins. Le plus haut tribunal des États-Unis, dans un verdict à 5 juges contre 4, décide simplement que le recomptage n'aura pas lieu, ouvrant ainsi la porte du 1600, Pennsylvania Avenue, à George W. Bush.

À peine 567 voix éparpillées en Floride auront donc fait la différence. Dans sa dissidence très dure, un juge de la Cour suprême, John Paul Stevens, considéré comme un progressiste, écrit: «Même si on ne connaîtra peut-être jamais avec une certitude complète l'identité du vainqueur de cette élection présidentielle, l'identité du perdant est parfaitement claire: c'est la confiance du pays dans ses juges en tant que gardiens impartiaux du règne du droit.»

Est-ce que les juges sont allés trop loin en mettant fin à cette incertitude politique qui durait depuis cinq semaines? Peut-être, convient Bill Turque, avec le recul. «Il y a maintenant un consensus assez fort aux États-Unis sur le fait que le verdict a été rendu avec un regard politique sur la situation, et non pas juridique.»

Un verdict qui a tout changé. «Toutes les recherches montrent que l'occupant de la Maison-Blanche et son équipe ont une grande influence sur les affaires du monde, et pas seulement sur ce qui se passe aux États-Unis. Il est donc évident que si Al Gore avait gagné, les choses auraient été différentes», explique Charles-Philippe David, titulaire de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l'UQAM. M. David, qui est aussi coprésident de l'Observatoire des États-Unis, a vécu à Washington en 2002 et 2003.

Une guerre en Afghanistan, mais pas en Irak

Les deux experts s'entendent pour dire qu'un gouvernement dirigé par Al Gore aurait répliqué lui aussi aux attentats terroristes de New York et Washington en frappant l'Afghanistan et les camps d'al-Qaïda. Mais il y a des nuances sur la suite des choses.

«Il y aurait eu une guerre contre la terreur et une intervention en Afghanistan, mais le conflit en Irak n'aurait pas eu lieu, soutient Bill Turque. Les États-Unis auraient probablement mis leurs efforts à combattre le terrorisme et non pas à renverser Saddam Hussein.»

Charles-Philippe David abonde en ce sens, mais il affirme qu'Al Gore n'aurait pas été indifférent au dossier irakien pour autant. «Gore aurait continué la stratégie américaine d'endiguement de l'Irak, avec des sanctions et des bombardements aériens. Mais, selon mon intuition, il n'aurait jamais envahi l'Irak», dit-il. Résultat: une guerre et des centaines de milliers de morts en moins.

La guerre en Irak a aussi détourné les États-Unis du conflit en Afghanistan à un moment crucial, laissant les insurgés reprendre des forces et se réorganiser à l'abri des pressions, puisque la coalition internationale avait trop peu de soldats sur le terrain pour traquer les talibans. Le bourbier afghan s'est creusé pendant que les États-Unis regardaient ailleurs. «Aujourd'hui, on paye le prix de cette négligence», tranche Charles-Philippe David.

Respect de l'ONU

De la même manière, la fumisterie de Colin Powell sur les armes de destruction massive devant l'ONU, le 5 février 2003, n'aurait pas eu lieu. Avec un Al Gore président, les États-Unis n'auraient probablement pas utilisé les Nations unies comme faire-valoir pour attaquer Bagdad. Par conséquent, la France et l'Allemagne — cette «vieille Europe», selon Donald Rumsfeld — n'auraient pas brûlé les ponts avec Washington. De plus, le monde arabe n'aurait pas avalé de travers les interventions de Bush...

«Le ton des relations internationales aurait été différent avec Gore, puisqu'il n'est pas du style à faire de la "diplomatie de cow-boy" comme Bush, dit Bill Turque. On peut penser que la politique étrangère des États-Unis aurait été plus mesurée. Un gouvernement Gore aurait été plus collaborateur avec les instances multilatérales.»

S'attaquer aux changements climatiques

Dans le dossier des changements climatiques, la position d'Al Gore est bien connue. Ce danger pour la planète aurait fait partie de ses priorités, estiment les spécialistes. «Je pense qu'un gouvernement Gore aurait tenté de placer les États-Unis dans une position de leadership dans le dossier des changements climatiques», dit Bill Turque. Il ajoute toutefois un bémol. «Il faut prendre en compte la composition du Congrès, qui limite le pouvoir du président. Si Gore avait fait face à un Congrès à majorité républicaine, il n'aurait pas eu toute la marge de manoeuvre souhaitée.»

N'empêche, affirme Charles-Philippe David, les États-Unis n'auraient pas été à ce point en retard dans ce dossier. «On peut penser qu'une partie des 800 milliards de dollars par année que le gouvernement Bush a injectés dans la défense et la sécurité aurait été consacrée à la lutte contre le réchauffement de la planète», dit-il.

L'économie américaine, moins dépendante du carbone, n'en aurait été que plus performante. Et les tensions entre les pays sur ce dossier, bien visibles à Copenhague il y a deux semaines, auraient été moins vives. Le Canada, de son côté, aurait été forcé de suivre son allié dans la lutte contre les changements climatiques, plutôt que d'attendre passivement.

Pas de Barack Obama

On peut même pousser la réécriture de l'histoire plus loin et se demander qui dirigerait les États-Unis aujourd'hui si Gore avait été en poste de 2000 à 2008. Probablement pas Barack Obama, premier Noir à accéder à la Maison-Blanche.

«Barack Obama a fait campagne sur un important message de changement, rappelle Bill Turque. Si Gore avait fait deux mandats, est-ce que cet appel aux Américains, de la part d'un autre démocrate, aurait été possible?»

Évidemment, pas de président Obama, pas de prix Nobel de la paix non plus. «Les années Bush ont tellement été marquantes pour la planète qu'on a donné un Nobel d'anticipation à Obama», dit Charles-Philippe David. Bref, un Nobel parce qu'il répare les dommages causés par Bush.

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Avec la collaboration de Marie-Christine Bonzom à Washington.

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Mon commentaire:

pas tout à fait faux tout cela, une belle auto-critique que je respecte sans réserves.

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